mardi 21 juin 2022

témoignage de Khan

Image de Sophie Pluen (format A3, technique mixte, encre, acrylique, aquarelle, feutre)

texte de Kathleen Olivier

témoignage de Khan


40 euros minimum

Aîné de sa fratrie, dans un village de montagne à la frontière entre Pakistan et Afghanistan, Khan est géomètre ingénieur et couturier. Aussi, il parle plusieurs langues: puchtu, urdu, anglais. Un jour, des talibans lui demandent de leur prêter ses compétences. C'est la 'loi noire', s'il refuse, il en paiera de sa vie. On ne peut pas se cacher dans le pays. Il ne peut que partir.
 Un sac à dos avec quelques provisions, ses papiers, un téléphone. Iran. Ils sont quelques uns sur le chemin. Turquie. Ils peuvent se nourrir de fruits dans les jardins en Serbie.  A la frontière grecque on leur prend leurs affaires, on casse leurs téléphones, il faut décourager les suivants... Khan passe par l'Italie, est renvoyé en Serbie, repart.  Autriche, Allemagne, certains restent mais il continue vers la France car il a entendu parler de sa culture. Comment choisir une terre d'accueil?
 A Paris, on lui indique les camps Porte de la Chapelle. Des véhicules viennent les chercher. La procédure commence. On lui attribue un avocat. Il fait confiance, raconte son histoire. Pendant ce temps, il est envoyé à Perpignan, il étudie le français à l'université. La procédure échoue. Il fait appel comme on lui indique. Il peut changer d'avocat au besoin conseillé par ses camarades. Il va à Paris et répond aux questions que lui pose le juge. Il fait ce qu'on lui demande. Le second recours échoue. Il n'a plus aucune aide.
 Il est accueilli par une française et c'est la solidarité qui se poursuit. Il n'aime pas demander. Des mois ont passé. Il se prépare pour retourner à Paris défendre encore une fois son dossier, il faut plus de preuves de la dangerosité de son retour au Pakistan. Les talibans ont déjà questionné et blessé plusieurs membres de sa famille, ce sera pire si ces derniers racontent ce qui se passe et que le message est intercepté. Khan de son côté leur dit que tout va bien pour lui en France, ils souffriraient encore davantage de savoir la vérité. Khan sourit, toujours. Comme il a toujours fait. Avant les talibans. Aujourd'hui encore alors qu'il n'a rien et qu'il ne sait pas ce qui se passera. Pour lui, il est évident de rester. Il parle et aime la langue française, il partage ses savoirs de couturier aux étudiants de l'université, il veut pouvoir redonner au pays qui a payé pour ses études. Il ne veut pas se retrouver à devoir survivre de manière frauduleuse. Alors il sourit, il remercie, nous buvons le thé, le temps semble suspendu entre drame et espoir, Khan est en vie, et moi j'entends son histoire qui me trouble, je ne pourrai pas faire comme si je n'avais pas entendu...
Kathleen  Olivier


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